Historique

Les origines du Lycée de Garçons remontent à la première moitié du 19me siècle, époque à laquelle le Luxembourg voit naître, à côté d’une agriculture et d’un artisanat archaïques, l’industrie et les instituts financiers. L’Athénée ayant pour mission principale de former l’élite intellectuelle du pays sur base d’un enseignement avant tout humaniste, il y eut un besoin évident de donner vie à une école pouvant assurer la formation d’ingénieurs et de comptables. Ainsi, la loi du 23 juillet 1848 sur l’enseignement supérieur et moyen crée à l’intérieur de l’Athénée «une école industrielle ouverte aux jeunes gens qui se destinent aux arts, à l’industrie et au commerce». Le Gymnase, quant à lui, continue à dispenser un enseignement humaniste basé sur l’apprentissage des langues anciennes.

L’Athénée abrite donc en son sein deux écoles jusqu’à l’adoption de la loi du 28 mars 1892, qui sépare l’École Industrielle du Gymnase de l’Athénée et la place sous une direction spéciale. C’est la naissance de l’École industrielle et commerciale, l’ancêtre lu Lycée de Garçons de Luxembourg.

L’Athénée vers 1828. Ce bâtiment a accueilli les élèves de l’Ecole industrielle jusqu’en 1908.

Les deux écoles restent d’abord logées sous un même toit, celui de l’actuelle Bibliothèque nationale de Luxembourg, près de la cathédrale. Cette promiscuité propice à des conflits entre les directeurs et les élèves des deux établissements ne prendra fin qu’en septembre 1908. C’est à cette date que les élèves et les professeurs prennent possession du bâtiment en briques rouges de le Place Auguste Laurent dessiné par l’architecte Gustave Serta. C’est ce même édifice qui héberge encore actuellement le Lycée de Garçons.

Les troupes allemandes occupent le bâtiment en août 1914, mais elles quittent les lieux avant la rentrée. L’Occupation allemande a moins d’incidence sur la vie scolaire que sur la liberté d’expression. Les élèves et leurs enseignants doivent en effet s’abstenir de toute discussion politique et de toute action pouvant être considérée par les forces d’occupation comme une provocation.

L’entre-deux-guerres est propice au développement des départements de sciences. Etant donné que les élèves fréquentant les Cours supérieurs, section des sciences, suivent le même cours que les élèves de première industrielle de l’École industrielle et commerciale, des salles de travaux pratiques sont aménagées et équipées. Les départements de sciences en profitent pour enrichir leurs collections. Nombre de ces appareils font aujourd’hui partie de la collection exceptionnelle d’anciens instruments dont le LGL peut s’enorgueillir.

En 1940, dans le cadre de la politique de germanisation du pays, l’occupant commence à démanteler l’École industrielle et commerciale pour la remplacer par un lycée du type «Gymnasium». On assiste ainsi à l’installation de deux institutions dans l’enceinte du même bâtiment : la «Staatliche Limpertsberg-Oberschule für Jungen» et la «Goethe-Schule», une école de type allemand dans son organisation et pour ce qui est de la matière enseignée. Au lycée s’installe un climat de terreur auprès des élèves et des enseignants. Les professeurs sont obligés de participer à des stages obligatoires d’endoctrinement en Allemagne, les élèves sont incités à s’inscrire dans la «Hitlerjugend», sous peine d’être exclus de l’école. Les professeurs récalcitrants sont démis de leurs fonctions; des enseignants allemands viennent systématiquement prendre la place des professeurs-régents. A partir de septembre 1942, de nombreux élèves sont enrôlés de force et obligés de porter l’uniforme abhorré de la Wehrmacht. La plupart d’entre eux se retrouvent sur le front russe. Certains ne reverront plus le pays. L’École industrielle et commerciale a payé un lourd tribut à la Seconde Guerre mondiale.

L’Ecole industrielle et commerciale en 1911

L’armée allemande devant l’Ecole industrielle et commerciale en 1914

Gustave Faber, directeur de 1917 à 1945

Le Corps Enseignant dans les années 1930

A partir de 1945, l’établissement accueille outre les sections traditionnelles des classes gymnasiales identiques à celles de l’Athénée. L’école, rebaptisée «Lycée de Garçons de Luxembourg» dispense dorénavant un enseignement secondaire aboutissant à un diplôme qui ouvre aux bacheliers les portes des universités. Très vite, on voit le nombre d’élèves exploser ; les locaux du lycée deviennent trop exigus. L’agrandissement de l’établissement, devenu nécessaire, passe par le prolongement des ailes latérales. A la fin des années 1950, l’aile nord s’enrichit ainsi de 12 salles de classes, mais il faudra attendre 1964 pour voir s’ériger dans l’aile sud des locaux destinés aux départements de sciences naturelles.

La loi du 10 mai 1968 instaure entre autres la mixité dans les établissements d’enseignement secondaire. Le LGL cesse d’être un lycée réservé aux seuls garçons, mais préserve le nom. Cette loi uniformise en outre l’offre scolaire de l’enseignement secondaire. Le LGL devient un lycée «comme les autres». Mais bien vite, il se distingue à nouveau, en étant le premier lycée du Grand-Duché à offrir la section E. Le nombre d’élèves augmente considérablement et certaines classes doivent être déplacées dans les locaux de l’ancienne École européenne située sur le boulevard de la Foire. En même temps, le bâtiment principal se détériore. Les salles de classe sont dans un état de délabrement avancé, sans eau courante (chaque salle reçoit le matin un seau rempli d’eau qui servira à nettoyer le tableau pendant 4 à 6 heures). Les salles de sport sont dans un état pitoyable. Une restauration s’avère indispensable.

Dès 1992, un crédit spécial est mis à la disposition du LGL pour rénover l’aile des sciences. Les travaux débutent en 1994. Entre-temps, des sondages effectués sur les bétons d’origine révèlent que les locaux datant de 1907 ne correspondent plus aux normes de sécurité. Il est décidé de reconstruire toute la partie intérieure du bâtiment original; seuls subsisteront les murs extérieurs faisant le cachet de l’édifice. Pour réaliser les travaux sans déplacer les élèves, on décide d’instaurer un horaire aménagé, qui a déjà fait ses preuves avec des classes sportives. Une partie du lycée est en restauration durant les après-midi, l’autre accueille les élèves de 8h00 h à 14.00 h respectivement 15.00 h. Une approche insolite, qui demandera beaucoup de patience et de compréhension de la part de toute la communauté scolaire, car durant près d’une décennie, l’enseignement a lieu dans un quasi-chantier.

Au cours des années 2000, des projets d’établissement de grande envergure voient le jour, traitant alternativement des arts («Toutlézard»), des langues («LanGues déLiées»), des sciences («LGL en FRVscience»), d’engagement et de responsabilité («LGL en gage») et de la communication («LGL Com’On»; projet en cours). Lors du projet d’établissement «LGL en FRVscience», le lycée a la chance d’accueillir en 2013 un de ses anciens devenus prestigieux: le prix Nobel Jules Hoffmann. Le projet «LGL en gage» s’est, lui, terminé par une grande marche de la solidarité lors de laquelle toute la communauté scolaire s’est déplacée de l’enceinte du LGL à la place d’Armes où de nombreuses activités ont vu le jour, ensemble avec des ONG.

Soldats américains dans la cour du lycée en novembre 1944

Restauration du bâtiment dans les années 1990

Depuis l’année scolaire 2015-2016, le LGL a une nouvelle équipe dirigeante qui se trouve face à plusieurs défis: finaliser la charte scolaire et donner au lycée de tradition un profil digne de son histoire, ainsi qu’éventuellement un nouveau nom. De plus il faut repenser les aménagements intérieur et extérieur du bâtiment qui avait été rénové pour 850 élèves, mais qui accueille toujours entre 1100 et 1150 élèves. Dès cette année scolaire d’ailleurs, le complexe sportif sera transformé.

En 125 ans, le Lycée de Garçons de Luxembourg a ainsi traversé trois siècles et deux guerres mondiales, il a accueilli l’enseignement moyen, technique et commercial, l’enseignement classique et les cours universitaires. Il avait été créé en vue de relever les défis de l’industrialisation et de l’expansion d’un Luxembourg naissant. Gageons qu’il saura aussi adapter son profil aux exigences de la société du 21me siècle.

Pascal Daman