Rencontre à l’Abbaye de Neumünster avec Dina Schweitzer, victime de la Shoah

Cela fait 75 ans que les premiers juifs ont été déportés au Luxembourg et c’est en cette occasion que l’abbaye de Neumünster a organisé autour de ce thème des rencontres particulières dont une à laquelle les élèves de la classe de 3B du lycée de garçons et leur professeur Madame Stéphanie Duchaine ont eu le privilège d’assister.

Le 29 juin 2017, l’abbaye de Neumünster a invité un témoin de la Shoah et c’est aussi pour la toute première fois au Luxembourg que Madame Dina Schweizer a pris la parole devant tout un public de jeunes et de moins jeunes, intéressés et intrigués par l’histoire surprenante de cette rescapée, originaire de Pologne et mariée à un Luxembourgeois.

Madame Schweizer n’était âgée que de 7 ans lorsque les Allemands ont pris possession de la ville où elle habitait en 1941. Seulement deux semaines après l’intrusion des troupes allemandes, la famille a dû se rendre dans un ghetto. C’est alors que Dina Schweizer a vu disparaître un à un les membres de sa famille. D’abord sa mère, morte du typhus, puis son père abattu froidement par les soldats. Dina était désormais orpheline, mais a essayé de se cacher tant bien que mal avec ses frères et sœurs dans un grenier de la maison qu’ils occupaient. Les soldats, les ayant malheureusement découverts, les ont emmenés dans un autre ghetto où une première sélection a eu lieu. Les plus forts étaient directement séparés des plus faibles, les malades et les personnes âges étaient aussitôt assassinés. La sœur de Dina a compris que même les plus jeunes n’auraient pas de chance de survie et c’est alors qu’elle a prié un soldat de laisser partir sa plus jeune sœur, Dina. Ce fut la toute dernière fois que Dina a vu sa sœur.

Dina s’est alors rendue chez sa nourrice, Kascha, qui l’a cachée chez elle. Cependant, cette manœuvre était très dangereuse et Kascha a elle-même risqué sa vie. C’est alors pour cette raison qu’elle a emmené Dina en Galicie, dans un village très retiré où sa propre sœur habitait avec ses trois enfants. Durant tout le voyage, Dina a dû se cacher et ne pas montrer son visage. Elle avait les cheveux noirs tressés, alors que tous les habitants d’Ukraine sont blonds aux yeux bleus.

Dina a vécu dans des conditions hygiéniques catastrophiques et a toujours dû faire attention de ne jamais dévoiler son identité. La nourriture était toujours la même car elle était peu onéreuse et permettait d’être tout de même bien nourri. Les gaudes étaient toujours accompagnées d’un peu de pain, ce qui lui permettait d’avoir l’estomac bien rempli. Pendant quatre ans, Dina a vécu dans cette famille et ce n’est qu’en 1945 que Kascha est revenue la chercher.

Après ce témoignage émouvant, les élèves ont eu la possibilité de poser quelques questions à Madame Schweizer, qui s’est toujours fait un plaisir d’y répondre. Elle a d’ailleurs avoué n’avoir jamais parlé de son histoire à ses enfants. Ce n’est que depuis quinze ans qu’elle a commencé à la raconter.

 

Cette rencontre a permis aux élèves d’avoir une autre approche quant à l’époque de la guerre et plus particulièrement concernant la condition de vie inhumaine des ghettos. Cette opportunité unique a donc donné la possibilité aux élèves d’avoir un tout autre aperçu de cette période de la guerre et cela a été pour nous tous une expérience unique pour réfléchir, agir et comprendre.

 

Stéphanie Duchaine